Bazouges-la-Pérouse : une « petite cité de caractère » bientôt défigurée par les éoliennes

Les touristes qui ont participé l’été dernier aux visites guidées organisées par le Syndicat d’Initiative de Bazouges-la-Pérouse, ont vu la « petite cité de caractère » comme ils ne la verront plus jamais, c’est-à-dire sans éoliennes.

En effet, la Société BORALEX a annoncé, en septembre dernier, qu’ils vont construire leur parc de 4 éoliennes de 180 m de haut (deux sur Bazouges, deux sur la commune voisine de Noyal-sous-Bazouges), dans le courant du premier semestre 2020.

L’arrêté préfectoral autorisant ces constructions d’éoliennes industrielles a été rendu le 12 novembre 2018 et, aucun recours n’ayant été engagé, rien ne s’oppose donc à la dégradation programmée du paysage bazougeais. Ils ont même été étonnés, chez le promoteur, qu’il n’y ait pas de recours et que tout soit si facile. Car il faut rappeler que 70 % des projets éoliens font l’objet de recours de la part de futurs voisins de ces machines.

L’Architecte des Bâtiments de France avait pourtant rendu un avis très défavorable à ce projet, principalement en raison de l’atteinte au Mont-Saint-Michel, situé à 30 km de Bazouges et classé patrimoine de l’UNESCO, mais aussi en raison de l’existence de monuments historiques sur la commune, dont le Château de la Ballue et ses jardins.

Et le Conseil municipal avait pourtant donné un avis défavorable à ce projet, lors de l’enquête publique, à une majorité de 11 voix contre 5. La municipalité aurait peut-être pu avoir plus de « caractère », et faire un recours en annulation contre l’arrêté autorisant ces éoliennes qui vont défigurer Bazouges, puisque les conseillers étaient majoritairement défavorables. Mais le maire, lui, est pour. Alors…

Certains habitants commencent seulement à réaliser ce qui va leur arriver. Mais ils n’ont plus que leurs yeux pour pleurer, hélas.

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Bazouges est un très ancien village, perché sur une butte, ce qui en a fait son intérêt touristique. Dans les années 1970, des artisans et artistes sont venus s’y installer, redonnant vie aux échoppes anciennes autour de la place et à beaucoup de maisons du bourg. Mais au bout de deux décennies, les artisans et artistes ont déserté Bazouges. Il y a toujours un flux de touristes, et le label « petite cité de caractère » a été reconduit en 2018, malgré le projet éolien.

Mais quel sera le « caractère »de ce village typique, sur sa colline, quand il sera flanqué de 4 éoliennes géantes de 180 m de haut que les touristes verront à l’approche du village, mais qu’ils verront également de l’intérieur-même du bourg, au détour d’une rue, d’une maison ? Si des vacanciers viennent encore par là, quand le parc éolien sera construit, ce ne sera pas pour admirer les éoliennes au cours d’un quelconque « circuit des éoliennes », car ils seront trop nombreux, les beaux villages de notre pays, à cohabiter avec des éoliennes de plus en plus hautes. Les éoliennes n’auront rien d’une « curiosité », et les endroits où il y en aura seront des endroits à fuir, pas à visiter.

Le touriste ira ailleurs, il évitera « le Bazougeais », réquisitionné au profit de l’industrie éolienne. A noter que même le nom de « Bazougeais » a été confisqué aux habitants du secteur, puisque BORALEX a appelé son projet « Projet éolien du Bazougeais ».  On commence à s’approprier votre nom, puis on s’installe chez vous, et enfin on vous prend votre âme.

AMLM

Eoliennes, méthaniseurs… Pour « sauver la planète », l’industrie tue les campagnes

Nous relayons ici un article du journal Reporterre qui défend  tous ceux qui croient en une vraie écologie et non pas en ces industriels qui n’ont comme seul  but de faire de l’écolo business au mépris de l’environnement, afin de verdir leur image et de faire des profits.

Pour « sauver la planète », l’industrie tue les campagnes

30 octobre 2019 / Blandine Vue

Au nom de la transition énergétique, les campagnes s’industrialisent à grande vitesse. L’autrice de cette tribune raconte la métamorphose de la Haute-Marne, autrefois vivante et dorénavant colonisée par les éoliennes, les méthaniseurs, les plantations de biomasse…

Blandine Vue est docteur ès lettres, diplômée en sciences du langage, lauréate de la Fondation Nicolas Hulot pour ses activités pédagogiques de terrain. Elle a publié plusieurs ouvrages, dont Histoire des paysages(éd. Errance) et un roman, La Colonie (éditions L’Harmattan).

Il est minuit, ma maison vrombit, mon cœur est écrasé, mon crâne résonne. Les fenêtres fermées, les boules Quies ne font qu’empirer les choses. Où aller ? Au fond des bois ? Les infrasons des éoliennes industrielles ne connaissent pas les frontières. Elles sont partout. Mon corps est à bout.

Seules deux vallées ne sont pas encore attaquées à proximité de chez moi. Les mâts des éoliennes et les méthaniseurs poussent aussi vite que tombent les forêts ! Il n’y a plus de refuge. La campagne s’industrialise.

J’ai passé le week-end chez moi, face aux collines, dans mon village de 70 habitants, la maison dans laquelle mes enfants ont grandi, qu’on a restaurée ensemble. J’avais beaucoup à faire, je n’ai rien fait ou presque, je n’ai pas eu besoin de regarder la météo pour savoir d’où venait le vent. Mon corps n’avait qu’une tension, fuir ce lieu inondé par un poison vibratoire. Du sud au nord, en passant par l’ouest, plus de 70 éoliennes industrielles de 150 mètres. À l’Est, six, 183 m de haut, diamètre 150 m, bientôt 29. Partout, des centaines en projet ou prêtes à sortir de terre. Du haut de la colline, j’ai dit adieu aux couchers de soleil il y a neuf ans, et récemment aux levers. Adieu à la nuit pure. Les promenades sur le plateau rendent fou.

Les bois qui n’ont pas encore été rasés sont dépouillés depuis qu’on ne parle plus de forêts, mais de biomasse

À 200 m de la maison, deux fermes, « normales » il y a peu, incarcèrent désormais douze mois sur douze quelques centaines de vaches sous les tôles. Ventilateurs, tanks à lait, robots de traite, engins qui désilent, mélangent, transportent, paillent, distribuent, curent, et retransportent. Les bruits de moteur sont incessants. Vaches à méthane ou vaches à lait, toutes ont le même sort, les riverains aussi !

Marie, une riveraine, est à bout, sur sa petite route de campagne. Sept jours sur sept, les tracteurs passent pour alimenter le méthaniseur voisin en fumier collecté dans un rayon de 60 km, les prés ont été retournés pour planter le maïs qui servira à nourrir le méthaniseur et les vaches prisonnières qui fournissent la manne. La paille aussi voyage. Sous la canicule, les vaches enfermées hurlent, tapent nuit et jour dans la ferraille qui les enferme, l’ensilage pue.

Où aller ? Au fond des bois ? Quels bois ? Ceux qui n’ont pas encore été rasés sont dépouillés depuis qu’on ne parle plus de forêts, mais de biomasse. De mes fenêtres, je vois clair au travers des collines. Plus de sous-bois, des champs de troncs. Le long des chemins, les arbres trop jeunes, condamnés à ne pas devenir des chênes centenaires, s’alignent, en attendant d’être déchiquetés avec beaucoup d’énergie, recollés en pellets, voire transformés en carburant !  Lire la suite => https://reporterre.net/Pour-sauver-la-planete-l-industrie-tue-les-campagnes